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Soutenabilité budgétaire : entre pression des investissements et objectif de rigueur

Soutenabilité budgétaire : entre pression des investissements et objectif de rigueur

Avec un déficit qui s’est creusé à 54,1 milliards de dirhams à fin août 2025, le Maroc fait face à une équation budgétaire complexe : financer ses investissements publics d’envergure, liés notamment à la CAN 2025 et au Mondial 2026, tout en maintenant une trajectoire de soutenabilité des finances.

 

Par Y. Seddik

À fin août 2025, le déficit budgétaire a atteint 54,1 milliards de dirhams contre 32,9 milliards un an auparavant, soit une aggravation de près de 65%, selon la Trésorerie générale du Royaume (TGR). Cette détérioration survient malgré une progression notable des recettes ordinaires (+17%), qui se sont établies à 271,7 milliards de dirhams. L’impôt sur les sociétés (+33%) et l’impôt sur le revenu (+18,3%) ont constitué les principaux moteurs de cette dynamique, aux côtés de la TVA, première source de recettes fiscales, en hausse de 10%.

Les recettes non fiscales ont également contribué positivement, tirées par les versements des monopoles publics et de Bank Al-Maghrib. Toutefois, cette embellie sur le plan des recettes n’a pas suffi à compenser l’augmentation soutenue des dépenses. Les charges ordinaires se sont accrues de 16,5%, atteignant 252 milliards de dirhams, sous l’effet combiné de la hausse des dépenses de biens et services (+18,5%), de la masse salariale et du service de la dette (+9,3%). Les dépenses d’investissement poursuivent leur tendance haussière, atteignant 72 milliards de dirhams, contre 67 milliards à la même période en 2024.

Cette progression de 7,3% illustre la volonté de l’État de maintenir un haut niveau d’investissement, notamment dans les infrastructures, en lien avec deux échéances sportives majeures : la Coupe d’Afrique des Nations 2025 et la Coupe du monde 2026. Ces projets structurants sont porteurs de retombées économiques et sociales à moyen terme, mais ils exercent une pression immédiate sur les équilibres budgétaires. Le défi consiste à concilier ces ambitions d’investissement avec une trajectoire soutenable de finances publiques.

Financement : un recours diversifié aux marchés

Le besoin de financement du Trésor s’est établi à près de 76 milliards de dirhams à fin août, contre 45 milliards un an plus tôt. Pour y répondre, l’État a mobilisé deux leviers : premièrement, le financement intérieur, qui a couvert environ 50 milliards de dirhams, via les adjudications et dépôts au Trésor. Et puis le financement extérieur, qui a apporté un flux net positif de 25,5 milliards de dirhams, grâce notamment à une émission internationale de 20,9 milliards et à des financements de la Banque mondiale (BIRD).

Cette orientation vers les marchés extérieurs traduit une volonté de diversifier les sources de financement et d’atténuer la pression sur la dette intérieure, qui s’élève désormais à 786,5 milliards de dirhams. Il faut dire que la situation des finances publiques en 2025 illustre une équation plutôt complexe. D’un côté, une dynamique de recettes solides, portée par une fiscalité performante et une contribution accrue des monopoles. Et de l’autre, une croissance soutenue des dépenses courantes et une stratégie volontariste d’investissement public.

Malgré la hausse actuelle du déficit, le gouvernement réaffirme son engagement à ramener progressivement le solde budgétaire vers 3% du PIB en 2026 et 3,5% en 2025, un niveau considéré comme soutenable et compatible avec la stabilisation de la dette publique. Cette discipline s’inscrit dans une stratégie plus large de consolidation budgétaire visant à préserver la stabilité macroéconomique tout en soutenant la croissance.

Selon le ministre du Budget, la trajectoire retenue repose sur une logique simple : «plus la croissance est robuste, plus elle élargit nos marges de manœuvre budgétaires; à l’inverse, une croissance faible nous oblige à resserrer les dépenses afin de contenir l’endettement».

L’objectif affiché est de réduire sensiblement le ratio dette/ PIB, en le ramenant de 72% en 2022 à moins de 67% d’ici 2026. Cette stratégie bénéficie du soutien d’institutions financières internationales, au premier rang desquelles le Fonds monétaire international (FMI), qui devrait prochainement renouveler sa ligne de résilience climatique en faveur du Maroc. Une perspective qui viendrait confirmer la crédibilité du pays sur les marchés et la solidité de sa gestion budgétaire. Si la cible de déficit de 3,5% du PIB apparaît réaliste à ce stade, sa soutenabilité dépendra de la capacité du Maroc à maintenir un rythme robuste de croissance économique, tout en veillant à la maîtrise des charges de fonctionnement et du service de la dette. 

 

 

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