Filière avocatier : le secteur peut-il concilier compétitivité et durabilité ?

Le secteur peut-il concilier compétitivité et durabilité ?

La filière est sévèrement critiquée pour sa grande consommation d’eau, même si elle réalise des performances remarquables en matière de production et d’export.

 

Par C. Jaidani

Le Plan Maroc Vert (PMV) a fait de l’exportation agricole l’un de ses principaux leviers de développement. Outre les produits historiques tels que les agrumes et les primeurs, d’autres filières ont bénéficié des incitations publiques destinées à stimuler leur production et à renforcer leur présence sur les marchés internationaux. C’est le cas de l’avocatier, dont la culture a connu une expansion spectaculaire ces dernières années.

Séduits par la rentabilité de ce fruit très demandé à l’étranger, de nombreux exploitants ont progressivement délaissé leurs cultures traditionnelles pour se lancer dans cette nouvelle aventure.

Résultat : la production nationale a bondi, au point de provoquer parfois une surabondance de l’offre et, par ricochet, une baisse sensible des prix. Mais ce succès a aussi soulevé de vives critiques. En cause, la consommation d’eau particulièrement élevée de cette culture, dans un contexte marqué par une pénurie chronique des ressources hydriques. Après plusieurs années de sécheresse, des voix se sont élevées pour réclamer l’interdiction pure et simple de la culture de l’avocatier.

Des parlementaires ont même interpellé le ministre de tutelle, estimant qu’il était urgent de repenser la stratégie agricole nationale face aux défis climatiques. Fatima Tamni, députée de la Fédération de la gauche démocratique (FGD), a, à maintes reprises, adressé des questions orales à la Chambre des représentants à ce sujet. Elle estime que «les cultures qui consomment beaucoup d’eau accentuent le stress hydrique et sont une menace pour la souveraineté alimentaire nationale. Il est urgent de traiter ce problème avec plus d’intelligence et d’innovation». En réaction, l’Etat a arrêté les subventions accordées à la filière ainsi qu’à d’autres activités consommatrices d’eau, comme les pastèques.

Il a imposé de sévères restrictions sur l’utilisation de l’eau pour irriguer les plantations, mais cela n’a pas suffi à stopper leur expansion. Du côté des professionnels du secteur, il est hors de question d’interdire cette culture. Ils mettent en valeur les avantages socioéconomiques favorables engendrés, tant en matière de création d’emplois, puisqu’elle assure 40.000 postes de travail, qu’en devises générées et investissements mobilisés.

«Le Maroc a enregistré ces dernières années des performances importantes face à de grands producteurs mondiaux d’avocats situés essentiellement en Amérique latine, notamment le Pérou, la Colombie et le Mexique. Ces pays sont plus avantagés que nous puisqu’ils sont dotés de bassins hydrauliques de grande importance comme celui de l’Amazonie. Malgré son climat semi-aride, le Royaume a toutes les potentialités nécessaires pour améliorer son rang mondial dans ce domaine. Il devrait être à terme le premier fournisseur de l’Europe qui importe près de 70%  des exportations marocaines», souligne Abdellah Yamlahi, président de l’Association marocaine de l’avocat (MAVA).

«Nous sommes conscients que l’avocatier consomme beaucoup d’eau. Il y a un défi de taille à relever en matière de durabilité, comme explorer de nouvelles pistes qui permettent d’accroître la productivité sans pour autant augmenter la superficie. L’utilisation de l’irrigation goutte à goutte et d’autres moyens technologiques de dernière génération peut favoriser cette démarche», conclut Yamlahi.

 

90.000 tonnes exportées 
La filière de l’avocatier occupe actuellement 7.000 hectares, pour une production annuelle moyenne de 40.000 tonnes. Pour la saison 2024/2025, un record de 100.000 tonnes a été atteint. Grâce à leurs bassins hydrauliques généreux en eau, les régions du Gharb et du Loukkos regroupent la majorité des exploitations. La filière est présente également dans le périmètre irrigué de DraâTafilat et de Souss. Au niveau de l’export, le Maroc expédie 90.000 tonnes par an, ce qui le place au 9ème rang mondial. L’Espagne est le principal client avec une part de près de 40%.

 

 

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