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Taux directeur : Bank Al-Maghrib confirme sa pause monétaire et précise ses chantiers

Taux directeur : Bank Al-Maghrib confirme sa pause monétaire et précise ses chantiers

Bank Al-Maghrib a maintenu son taux directeur inchangé lors de son dernier Conseil de l’année. Si la décision était attendue, le wali a profité de la conférence de presse pour clarifier la trajectoire du ciblage d’inflation et revenir sur plusieurs dossiers clés du secteur financier.

 

Par Y. Seddik

Sans grande surprise, le dernier Conseil de Bank Al-Maghrib de l’année a décidé de maintenir le taux directeur inchangé à 2,25%, conformément aux anticipations des marchés. Cette décision prolonge une pause monétaire entamée depuis plusieurs réunions, dans un contexte d’inflation basse, d’anticipations bien ancrées et de transmission monétaire encore incomplète. Le statu quo n’a toutefois pas écourté les débats.

La durée du Conseil et la densité de la conférence de presse du wali en témoignent : au-delà de la décision monétaire stricto sensu, plusieurs sujets structurants ont été longuement abordés, allant de la trajectoire future de la politique monétaire à des dossiers bancaires sensibles, en passant par le financement des très petites et moyennes entreprises.

Les indicateurs macroéconomiques ne plaidaient pas pour un changement de cap. L’inflation continue d’évoluer à des niveaux modérés, ressortant en moyenne à 0,8% sur les dix premiers mois de l’année. Bank Al-Maghrib anticipe une remontée graduelle, avec une inflation attendue à 1,3% en 2026, puis 1,9% en 2027, des niveaux compatibles avec l’objectif de stabilité des prix.

Du côté de la croissance, la Banque centrale table sur une accélération notable à 5% en 2025, portée par la vigueur des activités non agricoles et par l’investissement, avant une consolidation autour de 4,5% à moyen terme. Le marché du travail montre, pour sa part, des signes d’amélioration, avec 167.000 créations nettes d’emplois au troisième trimestre, même si la Banque reste attentive aux fragilités persistantes, notamment dans l’agriculture. Dans ce contexte, le maintien du taux directeur apparaît cohérent. D’autant plus que la transmission de l’assouplissement monétaire reste partielle : depuis le début du cycle de baisse en juin 2024, les taux débiteurs n’ont reculé que de 58 points de base à fin septembre 2025, contre 75 points de base pour le taux directeur. Un décalage qui incite Bank Al-Maghrib à laisser le temps à la mécanique monétaire de produire pleinement ses effets.

Un calendrier désormais stabilisé pour le ciblage d’inflation

Comme lors du Conseil de septembre, Abdellatif Jouahri est longuement revenu sur la réforme du cadre de la politique monétaire. Sans effet d’annonce, mais avec une constance remarquable, le wali a de nouveau confirmé la trajectoire retenue par Bank Al-Maghrib : 2026 constituera une phase pilote du ciblage d’inflation, avant une mise en œuvre effective et graduelle à partir de 2027.

Ce calendrier n’est pas nouveau. Il avait déjà été évoqué lors du précédent Conseil. Mais le discours de décembre marque une étape supplémentaire : la trajectoire est désormais stabilisée, assumée et répétée, sans ambiguïté. Le ciblage d’inflation n’est plus un simple horizon théorique, mais un cadre vers lequel la Banque centrale se prépare activement. Cette transition reste indissociable de la réforme du régime de change.

Le passage progressif d’un ancrage au panier Euro/ Dollar vers un ancrage fondé sur la politique monétaire suppose, à terme, que le taux de change joue un rôle moins central dans la décision monétaire. Mais là encore, le wali a insisté sur la prudence : pas de rupture brutale, pas de libéralisation précipitée, mais une succession d’ajustements graduels permettant aux marchés et aux opérateurs économiques de s’adapter. L’autre point technique qui a également été mis en avant par le gouverneur est relatif à la contrainte statistique. Si les textes de 2019 prévoyaient la possibilité d’augmenter la fréquence des réunions du Conseil dans un régime de ciblage d’inflation, la disponibilité limitée de données actualisées à un rythme plus rapproché ne le permet pas encore. La priorité est donc donnée au renforcement de la statistique nationale, condition indispensable à une conduite plus fine de la politique monétaire.

BMCI-Holmarcom : neutralité affichée, vigilance régulatoire

Interrogé sur les discussions en cours entre BMCI et le groupe Holmarcom, Abdellatif Jouahri a adopté un ton mesuré. «Effectivement, il y a un début de discussions entre les deux parties. Nous sommes au courant bien sûr», a-t-il déclaré, tout en précisant que Bank Al-Maghrib n’intervient à aucun moment dans l’orientation des négociations entre acheteur et vendeur.

À ce stade, il s’agit de discussions préliminaires, qui peuvent aboutir ou non. Mais si l’opération venait à se concrétiser, le rôle du régulateur deviendrait central. En vertu de la loi bancaire, tout changement de contrôle donne lieu à l’octroi d’un nouvel agrément, délivré par Bank Al-Maghrib après un examen approfondi du dossier. Le wali a détaillé le processus: analyse du projet industriel à moyen terme, appréciation de la solidité de l’actionnariat, respect des règles prudentielles, avant présentation du dossier au comité des établissements de crédit, composé de représentants du ministère des Finances et de Bank Al-Maghrib, qui tranche in fine. Une procédure classique, mais rigoureuse, qui rappelle que la consolidation du secteur bancaire reste étroitement encadrée.

Financement des TPE

Autre sujet central de la conférence : le financement des très petites et moyennes entreprises. Bank Al-Maghrib suit ce dossier de longue date, rappelant que 30% du refinancement du secteur bancaire doivent être orientés vers les TPME. Mais l’expérience du programme Intelaka a mis en lumière des limites structurelles. Sur les 9 milliards de dirhams mobilisés et les 38.000 entreprises financées, plus de 40% des projets présentés aux banques ont été refusés, faute de viabilité suffisante.

Un constat qui a conduit la Banque centrale à revoir son approche. Le diagnostic posé par Jouahri est clair : le problème n’est pas uniquement l’accès au financement, mais l’absence d’accompagnement tout au long du cycle de vie de l’entreprise. C’est dans ce cadre qu’a été lancée la Charte relative au financement et à l’accompagnement des TPE. Elle introduit plusieurs nouveautés majeures : la mise en place d’un scoring national de la TPME, en cours de finalisation avec Credit Bureau, que les banques seront obligées d’utiliser.

Toute dérogation devra être justifiée, tout comme tout refus de financement. Parallèlement, l’accompagnement sera renforcé, avec l’implication des CRI et de Maroc PME, en particulier dans les régions en dehors de l’axe CasablancaRabat. Sensibilisation, éducation financière et suivi sur la durée constituent désormais le cœur du dispositif. L’objectif affiché est de doubler les réalisations du programme Intelaka, avec l’appui de Tamwilcom, qui a revu les conditions de garantie.

 

 

 

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