Marché immobilier : dynamique prometteuse et risques de surchauffe

Marché immobilier : dynamique prometteuse et risques de surchauffe

Porté par une conjoncture économique plus favorable et une dynamique nationale tournée vers l’horizon 2030, le secteur immobilier montre des signes encourageants, sans être exempt de défis. Amine Mernissi, expert du secteur, décrypte les tendances actuelles, les effets du Programme d’aide directe au logement et les enjeux autour du locatif.

 

Propos recueillis par C. Jaidani

Finances News Hebdo : Plusieurs indicateurs laissent présager une conjoncture économique favorable. Pourrait-il y avoir un effet sur l’immobilier pour l’année en cours ?

Amine Mernissi : En effet, une dynamique économique positive ne peut avoir qu’un impact vertueux sur le secteur immobilier dans son ensemble. Si la transversalité socioéconomique de ce dernier n’est plus à démontrer, il reste néanmoins sensible aussi bien à la conjoncture qu’aux orientations étatiques structurelles. Par conséquent, il faut rester attentif à sa santé et continuer à suivre de près ces évolutions. Il est clair qu’aujourd’hui nous sommes sur une tendance favorable, portée notamment par cet horizon 2030 qui est sur toutes les lèvres, à savoir l’organisation du Mondial. Cependant, il faudrait mettre en garde contre une surchauffe, souvent due à un effet d’anticipation qui nourrit un phénomène spéculatif, et par voie de conséquence une hausse des prix des actifs immobiliers principalement dans les grandes villes et celles qui vont abriter le Mondial.

 

F.N.H. : Outre le résidentiel, comment se présente l’évolution des autres segments ?

A. M. : L’immobilier, ce n’est pas que le résidentiel, on a parfois tendance à l’oublier. Les autres segments comme l’immobilier commercial, professionnel, logistique, touristique… sont également portés par ce vent d’optimisme. Le Maroc de 2025 est un Maroc qui construit tous azimuts. Mise à niveau urbaine, grands chantiers de l’Etat, programmes d’infrastructures à grande échelle, tous les moyens sont mis pour accélérer, renforcer et moderniser les moyens et les capacités de notre pays à horizon 2030, et même bien au-delà. Il est clair que dans cette dynamique, le résidentiel est impacté positivement, mais également les autres segments de l’immobilier qui constituent des véhicules d’investissement et des éléments favorisant la croissance économique. Il y a un effet d’entraînement mutuel pour le bénéfice général du secteur.

 

F.N.H. : Comment jugez-vous le modèle de soutien proposé actuellement par l’Etat pour soutenir l’acquisition de logements ?

A. M. : C’est un modèle ambitieux que celui que l’Etat a mis en place à travers le Programme d’aide directe au logement (PADL). Depuis le 1er janvier 2024 à aujourd’hui, ce sont près de 128.000 demandes qui ont été formulées à travers la plateforme daamsakane et quelque 30.000 bénéficiaires qui ont pu concrétiser l’acte d’achat. Le succès de ce programme se mesure aussi à travers le taux de conversion entre la demande et la concrétisation. A ce niveau, il y a encore des progrès à réaliser…

 

F.N.H. : Quels sont les points sur lesquels il faut capitaliser pour l’améliorer ?

A. M. : La demande est là, maintenant il s’agit d’y répondre. Et y répondre, c’est rendre le produit demandé disponible. Peutêtre faut-il s’interroger à ce stade aussi, pourquoi est-il encore en deçà des attentes. Les professionnels de l’immobilier arguent que la rentabilité n’est pas au rendezvous et que l’équation est quasiimpossible en ce qui concerne le produit à moins de 300.000 DH. Et ce, en raison des coûts, notamment du foncier et des intrants qui hypothétiquent l’investissement. Aujourd’hui, pour améliorer le processus, et surtout pour qu’il puisse ne pas nourrir de la frustration tant chez les citoyens qui «veulent acheter mais ne trouvent pas» que chez les promoteurs «qui veulent construire mais ne peuvent pas», il faudrait analyser et débattre objectivement des facteurs qui empêchent le programme d’être efficient et ne pas hésiter à prendre les mesures idoines, pour à la fois respecter les intérêts de l’Etat, qui est à l’origine de ce Programme, et la volonté des promoteurs immobiliers, qui désirent y adhérer sans perdre de l’argent !

 

F.N.H. : Le locatif figure parmi les solutions qui permettent d’augmenter l’offre de logement. Quel est votre avis sur ce marché ?

A. M. : Le locatif est une niche en vogue. Tout le monde s’y met ! C’est aussi un signe de santé du marché que d’avoir une catégorie d’investisseurs qui s’y intéressent tant au niveau de la production que de l’exploitation. C’est en réalité tout un écosystème qui est impacté et qui s’ancre progressivement dans une forme de professionnalisme du secteur. Cela va du promoteur au commercialisateur, jusqu’à l’architecte d’intérieur et au gestionnaire de l’actif. Nous n’en sommes qu’au début de cette dynamique qui est promise à un bel avenir. Attention toutefois à la décorrélation entre les niveaux prix de certains actifs et leur rentabilité locative, tant aujourd’hui les prix ont tendance à prendre l’ascenseur… Donc, le locatif oui, mais pas à n’importe quel prix. 

 

 

 

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