Attractivité commerciale : «La diplomatie économique projette le Maroc comme plateforme d’intégration africaine»

Attractivité commerciale : «La diplomatie économique projette le Maroc comme plateforme d’intégration africaine»

Entre la réforme du climat des affaires, l’industrialisation accélérée et les investissements dans des infrastructures d’envergure, le Maroc a renforcé son positionnement comme pôle commercial incontournable en Afrique. Les provinces du Sud s’inscrivent pleinement dans cette dynamique, devenant un relais majeur de la croissance africaine. Entretien avec Khalid Kabbadj, économiste et expert en investissement et en gestion de patrimoine.

 

Propos recueillis par Ibtissam Z.

Finances News Hebdo: Le Maroc est désormais classé parmi les pôles commerciaux stratégiques en Afrique. Quels sont les principaux leviers qui ont permis ce positionnement et de renforcer son attractivité économique ?

Khalid Kabbadj : Le positionnement actuel du Royaume est l’aboutissement d’une vision royale clairvoyante, centrée sur la modernisation continue de l’État et la consolidation de la stabilité institutionnelle. Depuis plusieurs années, le Maroc a engagé des réformes structurantes renforçant la confiance des investisseurs et améliorant significativement le climat des affaires. Parallèlement, le développement de filières industrielles performantes, pleinement intégrées aux chaînes de valeur mondiales, a conforté la crédibilité économique du pays. À cela s’ajoute une ouverture assumée sur l’Afrique, portée par une diplomatie économique proactive, qui accroît l’influence et l’attractivité du Maroc sur le continent. Ainsi, le positionnement du Maroc comme hub continental repose non seulement sur une stratégie à long terme, mais aussi sur des politiques actives et des investissements concrets renforçant sa compétitivité. La réforme institutionnelle et la modernisation de l’État restent au cœur de cette stratégie : gouvernance, transparence et sécurité juridique séduisent les investisseurs internationaux. La diplomatie économique projette le Maroc comme plateforme d’intégration africaine. Sur le plan industriel, le Royaume développe des secteurs à haute valeur ajoutée. L’industrie automobile, par exemple, se renforce avec l’extension de l’usine Stellantis à Kénitra, qui portera sa capacité à 535.000 véhicules par an, principalement électriques ou hybrides. Cela illustre que le pays ne mise plus seulement sur la production traditionnelle, mais s’adapte à la mobilité de demain, ce qui le rend d’autant plus attractif pour les chaînes de valeur mondiales. Enfin, sur le plan logistique, le port de Tanger Med constitue un atout stratégique majeur, ayant dirigé près de 40% de son trafic 2023 vers l’Afrique subsaharienne, confirmant son rôle croissant dans les échanges intra-africains. Ce port s’impose comme une porte d’entrée logistique efficace vers tout le continent, ce qui renforce l’argument du Maroc comme plateforme.

 

F. N. H. : Dans quelle mesure les investissements massifs dans les infrastructures ont-ils contribué à ce classement et à la consolidation du Maroc comme plateforme commerciale régionale ?

K. K. : Ces investissements ont été déterminants. Le complexe portuaire Tanger Med constitue aujourd’hui l’une des principales vitrines de la performance logistique marocaine. Il a permis de structurer un écosystème industriel et exportateur parmi les plus compétitifs de la région. De même, l’expansion des réseaux autoroutiers, la modernisation du transport ferroviaire et l’aménagement de zones logistiques de nouvelle génération ont profondément transformé la capacité du Maroc à accompagner des flux commerciaux croissants. Le pays s’est doté d’infrastructures alignées sur les standards internationaux, capables de soutenir durablement sa vocation de plateforme régionale.

 

F. N. H. : Les provinces du Sud s’affirment aujourd’hui comme un espace d’investissement. Comment ces territoires contribuent-ils

à la concrétisation de la vision royale d’un Maroc moteur du développement continental ? K. K. : Les provinces du Sud constituent un exemple emblématique de développement territorial intégré et ambitieux. Leur montée en puissance repose sur des projets structurants dans l’énergie, la pêche, l’agro-industrie, le tourisme et la logistique. Ces territoires jouent un rôle stratégique en tant qu’interface économique naturelle entre le Maroc et les marchés d’Afrique de l’Ouest. Leur essor illustre la volonté nationale de bâtir des régions résilientes, modernes et pleinement connectées aux grandes dynamiques continentales. À cet effet, les investissements ont été importants, et plusieurs projets en témoignent :

• Réseaux routiers et express ways : Le plan de développement du Sud inclut notamment l’achèvement de la voie express Tiznit-Dakhla (environ 1.055 km), facilite la connexion avec l’Afrique de l’Ouest et renforce l’intégration économique des provinces du Sud.

• Projets énergétiques : plus de 1.400 MW de capacités renouvelables sont prévus dans les provinces du Sud entre 2025 et 2030.

• Hydrogène vert : C’est sans doute l’un des chantiers les plus ambitieux. Le gouvernement a validé six projets industriels dans les régions du Sud (Laâyoune, Dakhla…), représentant environ 319 milliards de dirhams (près de 30 milliards d’euros), pour produire hydrogène, ammoniac vert, acier vert et carburants synthétiques.

• Investissement privé : le groupe Taqa Morocco prévoit 100 milliards de dirhams pour une centrale renouvelable (6.000 MW) à Dakhla pour produire de l’hydrogène vert. Ces infrastructures renforcent non seulement la capacité logistique, mais repositionnent les provinces du Sud comme hub énergétique continental.

Aujourd’hui, les provinces du Sud ne sont plus seulement des zones périphériques, elles sont au cœur d’une stratégie de développement intégré. Par ailleurs, le développement humain et social est également au cœur de cette stratégie. Au premier semestre 2025, 16.423 hectares de foncier public ont été mobilisés à Laâyoune-Sakia El Hamra pour 41 projets, avec une enveloppe de 8,02 milliards de dirhams, créant plus de 1.300 emplois. L’OCP, via Phosboucraa, investit dans l’extension de la mine 1,25 milliard de DH, la construction d’une usine de lavage (2,184 Mds de DH) et un complexe d’engrais (10,246 Mds de DH) d’ici 2026. Deux nouveaux hôpitaux universitaires (Laâyoune et Guelmim) sont également prévus pour plus de 4 milliards de dirhams, garantissant l’accès aux soins et la formation médicale. Ces dynamiques montrent que le développement du Sud n’est pas uniquement infrastructurel, mais également humain, industriel et énergétique : une véritable stratégie de cohésion territoriale.

 

F. N. H. : Le Maroc aspire à jouer un rôle moteur dans la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). En quoi les provinces du Sud peuventelles constituer un maillon

fort dans cette intégration économique africaine ? K. K. : Le rôle des provinces du Sud dans l’intégration économique africaine est plus pertinent que jamais. Le port de Dakhla Atlantique est conçu pour devenir un hub logistique majeur entre le Maroc et l’Afrique de l’Ouest. La récente adoption par l’ONU d’une résolution soutenant le plan d’autonomie du Maroc pour le Sahara renforce la sécurité juridique des investissements, augmentant la confiance des investisseurs étrangers. Par ailleurs, la stratégie énergétique verte renforce la dimension continentale : la production d’hydrogène vert et d’ammoniac dans le Sud peut alimenter des chaînes de valeur africaines pour l’industrie et le transport. Ainsi, les provinces du Sud peuvent devenir un point névralgique de la ZLECAf, non seulement pour des échanges logistiques, mais aussi pour une production stratégique durable.

 

F. N. H. : Quelles sont les perspectives à moyen et

long terme pour consolider le rôle stratégique du Maroc et faire des provinces du Sud un modèle de développement durable ?

K. K. : Le Royaume poursuit une trajectoire ascendante, fondée sur la modernisation continue des infrastructures, le soutien à l’innovation et l’accélération de la transition énergétique. Les provinces du Sud, riches en ressources renouvelables et en potentiel logistique, joueront un rôle structurant dans cette dynamique, devenant un modèle national de développement durable, en cohérence avec les orientations royales et l’ambition du Maroc comme acteur central du développement économique africain. L’adoption de la résolution de l’ONU en faveur de l’autonomie du Sahara renforce la stabilité de la région et dissipe certaines craintes des investisseurs. La diplomatie économique reste active, avec notamment le forum Maroc-France qui se tiendra à Dakhla, visant à amplifier les partenariats dans la transition verte, les chaînes de valeur et l’innovation. En somme, le Maroc consolide non seulement sa position comme hub commercial, mais construit un modèle de développement continental durable.

 

 

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