Infrastructures : vers un modèle plus mutualisé, digital et inclusif

Infrastructures : vers un modèle plus mutualisé, digital et inclusif

Le secteur des télécommunications au Maroc, pilier stratégique de l’économie numérique nationale, est en pleine mutation. Face à des défis structurels, une demande en connectivité de qualité et une compétition accrue, les acteurs du marché - Maroc Telecom, inwi et Orange Maroc - réinventent leurs stratégies.

Depuis l’ouverture du marché à la concurrence au début des années 2000, le paysage télécoms marocain est dominé par trois opérateurs principaux. Maroc Telecom (IAM), héritier de l’opérateur historique, inwi et Orange Maroc structurent en effet l’offre mobile, la fibre optique, ainsi que les services grand public et entreprises. Malgré cette forte présence, le secteur fait face à plusieurs contraintes : saturation des réseaux urbains, inégalités d’accès dans les zones rurales, montée des besoins en haut débit et exigences accrues en qualité de service. La compétition entre opérateurs est intense, mais le modèle traditionnel basé sur la multiplication des infrastructures connaît ses limites.

Construire et maintenir un réseau de fibre optique et des sites 5G coûtent plusieurs milliards de dirhams. Ces investissements lourds, couplés à des attentes des consommateurs élevées, imposent une révision stratégique. Dans ce cadre, l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT) joue un rôle moteur. Afin de favoriser une couverture rapide et réduire les coûts, elle encourage le partage d’infrastructures, la création de réseaux neutres et impose des règles pour éviter les barrières à l’entrée. En effet, la demande pour la 5G, la fibre optique, ainsi que la montée en puissance des usages numériques dans les entreprises, administrations et ménages exigent une modernisation urgente des infrastructures.

Partenariat stratégique majeur

Face à ces défis, Maroc Telecom et inwi ont annoncé en mars 2025 un partenariat inédit pour mutualiser leurs infrastructures via deux coentreprises :

* FiberCo : dédiée au déploiement et à la gestion d’un réseau fibre optique à grande échelle, visant à raccorder 1 million de foyers dans deux ans, puis 3 millions en cinq ans. FiberCo accélère la pénétration de la fibre, améliore la qualité et réduit les coûts unitaires.

* TowerCo : consacrée à la construction, l’entretien et l’exploitation de plus de 6.000 sites 5G sur dix ans. Le déploiement de la 5G nécessite une densification des antennes pour une meilleure couverture, notamment urbaine. L’accord prévoit aussi l’ouverture de ces infrastructures à tout opérateur disposant d’une licence, dans le respect de la réglementation. Ce projet, évalué à 4,4 milliards de dirhams sur trois ans, marque un tournant stratégique. Il a été autorisé par l’ANRT par une décision en date du 23 juin 2025.

Le 26 juin, Maroc Telecom et inwi ont annoncé la constitution effective des jointventures «Uni Fiber» et «Uni Tower» en vue d’accélérer le déploiement de la fibre optique jusqu’aux abonnés (FTTH) et des réseaux 5G sur le territoire du Royaume. Rappelons que depuis 2024, l’ANRT a imposé le partage obligatoire des infrastructures passives - câbles, pylônes, fibres optiques - afin d’éviter la duplication des investissements.

Cette mesure vise à réduire les coûts et améliorer la couverture, notamment dans les zones rurales, où le taux de pénétration d’Internet reste inférieur à 60%, contre plus de 95% dans les grandes villes. Selon Yassir Benabdeljalil, expert en télécommunications et infrastructures numériques, «la mutualisation des infrastructures est un levier stratégique pour accélérer le déploiement des réseaux et réduire les coûts. Elle permet de renforcer la couverture, notamment dans les zones rurales, où l’accès au très haut débit reste encore insuffisant».

 

Accélération du déploiement de la 5G et de la fibre optique
Depuis 2023, l’ANRT a accéléré l’attribution des licences 5G, tout en renforçant la surveillance de la qualité de service. Selon les objectifs officiels du plan Maroc Digital 2030, la 5G devrait atteindre 25% de la population d’ici fin 2025, avec une montée à 70% d’ici 2030. Le lancement commercial est prévu pour novembre 2025, afin de coïncider avec la Coupe d’Afrique des Nations. Sur le réseau fixe, les lignes FTTP (fibre jusqu’au domicile) ont connu une progression notable. Entre mars 2024 et mars 2025, elles ont augmenté de 22,7%, passant à 1,13 million de lignes actives. . Ce rythme de croissance montre une adoption forte du très haut débit, même si le cap de 3,5 millions d’abonnés n’a pas encore été atteint.

 

L’ANRT soutient également le développement des réseaux neutres, gérés par des tiers indépendants, pour garantir un accès égalitaire à ces infrastructures entre tous les opérateurs. Cette stratégie facilite l’entrée de nouveaux acteurs et stimule la concurrence. «Le basculement vers des modèles de réseaux neutres et partagés est une évolution importante. Il ne s’agit pas seulement de rationaliser les coûts, mais aussi de créer un écosystème plus ouvert et plus concurrentiel, capable de stimuler l’innovation et de renforcer l’inclusion numérique sur l’ensemble du territoire», ajoute l’expert.

Une baisse des coûts pour les consommateurs

La mutualisation entre opérateurs via des structures dédiées permet de réduire les investissements. En limitant la duplication des réseaux, cette approche a permis une économie estimée à plus de 2 milliards de dirhams entre 2023 et 2025. Cette réduction des coûts d’infrastructure pourrait, à terme, se traduire par une baisse des tarifs pour les utilisateurs, dont le panier moyen mensuel Internet/mobile (data fixe et mobile) est aujourd’hui autour de 120 dirhams. En effet, en mutualisant les tours et la fibre, IAM et Inwi évitent des investissements en doublon, ce qui rend le coût d’accès plus efficient. De même, le client final ne sera pas impacté directement puisqu’il sera toujours client de l’un des opérateurs du marché. En outre, les consommateurs marocains bénéficieront d’un accès rapide à la fibre optique, d’une meilleure connectivité mobile (4G et 5G) et de tarifs adaptés aux différents segments de clientèle.

Par ailleurs, les zones sélectionnées seront celles non encore couvertes par les réseaux existants. Tous les consommateurs situés dans ces zones pourront bénéficier des infrastructures mises à disposition des opérateurs par les deux sociétés (FiberCo et TowerCo). Fracture numérique Le cadre évolutif facilite l’émergence des opérateurs mobiles virtuels (MVNO), qui gagnent en popularité avec une part de marché estimée à 10% en 2025. Ils proposent souvent des offres ciblées à bas coût, dynamisant la concurrence. De plus, le développement des services numériques spécialiséscybersécurité, solutions cloud, mobile money - est en pleine expansion. Par exemple, les transactions via mobile money ont augmenté de 85% entre 2023 et 2025, soutenant l’inclusion financière dans des régions où l’accès aux banques est limité. Malgré tous ces progrès, la fracture numérique reste cependant importante, notamment dans les zones rurales isolées où l’accès à Internet est encore relativement faible.

L’ANRT et les opérateurs investissent dans des solutions adaptées, telles que les réseaux neutres et le satellite, pour améliorer cette situation. Porté par les avancées dans la fibre et la 5G, le secteur télécoms s’engage aujourd’hui dans une nouvelle ère où la mutualisation, l’innovation et la régulation intelligente deviennent les leviers d’un développement numérique inclusif. Ce virage stratégique prépare le Maroc à affronter les grands défis de la digitalisation et à consolider sa place dans l’économie du futur.

 

Orange Maroc s’associe à Ericsson pour préparer l’arrivée de la 5G
En juin 2025, l’opérateur a conclu un partenariat stratégique avec Ericsson afin de renforcer et moderniser son infrastructure réseau. Ce projet ambitieux intègre des technologies de pointe, comme le dual mode 5G Core et la Cloud Native Infrastructure, qui augmentent la capacité, la flexibilité et la résilience du réseau. Orange Maroc déploiera aussi l’Ericsson Cloud Core Policy Controller et étendra ses sites IMS et Packet Core, pour améliorer les services VoLTE, l’Accès Fixe sans Fil, le haut débit mobile et la connectivité industrielle. La modernisation comprend également l’automatisation et l’orchestration avancées de l’infrastructure cloud, avec des solutions logicielles d’Ericsson permettant une gestion plus intelligente et performante. En s’inscrivant pleinement dans la stratégie Maroc Digital 2030, ce partenariat confirme l’engagement d’Orange Maroc à anticiper les besoins numériques de ses clients et à jouer un rôle moteur dans la transformation digitale et la croissance économique du Royaume.

 

 


 

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